Vous vous sentez à l’étroit dans une seule case ? Vous vous épanouissez dans la multitude et la diversité des projets ? Vous vous reconnaîtrez sans doute un peu en Jean-Luc Gadreau. Pasteur, musicien, auteur, compositeur, mais aussi animateur radio et TV, journaliste, rédacteur en chef, chargé de communication, coordinateur de festivals, représentant du Sel, membre de jury à Cannes et tant d’autres choses… Une personnalité patchwork, à éviter de ranger dans un tiroir : vous le trouveriez rapidement dans un autre. Rencontre.
Jean-Luc Gadreau, nous vous voyons, vous lisons, vous entendons sur plusieurs fronts. Qui êtes-vous ?
Alors, oui, je dois le reconnaître, cette pluralité de casquettes me correspond tout à fait. Je crois que ça fait pleinement partie de moi, de ma personnalité et, en tant que chrétien je dirai même de mon appel. Après des études de communication et journalisme, j’ai fait naturellement pas mal de radio dans les années 80. Dans cette même période, aimant chanter et étant musicien j’ai participé à l’aventure du groupe IMAGE (devenu Nouvelle Adresse) puis fondé le groupe Label 7. Avec mon épouse Nadiège, ce fut ensuite toute une période d’implication dans la louange avec le groupe Lukénade et quelques productions pour les enfants. J’ai également écrit le livre « Malléable, pour tout recommencer« .

Côté média, plusieurs années comme rédac chef des magazines « Construire Ensemble » puis « Horizons Évangéliques », et écriture régulière pour de nombreuses revues. J’ai aussi animé pendant 2 ou 3 années l’émission TV « 7 à vivre » qui passait sur GodTV et TBN Europe. Encore de la radio avec différentes émissions dont Gospelment Vôtre sur RCF National. J’ai été pasteur de la Fédération des Églises Évangéliques Baptistes de France : 9 ans à Royan, 3 à Paris et 7 à Poitiers.
Depuis septembre de cette année j’ai pris de nouvelles fonctions : à la fois chargé du développement et de la communication de la Fédération Baptiste, et coordinateur du Festival de télévision européen de programmes religieux qui se déroulera en Juin 2017 à Paris. Je suis aussi impliqué dans diverses commissions (communication, TV) à la Fédération Protestante de France.

Artistiquement, je viens d’écrire un roman « Là où les routes se croisent » que j’espère voir publier en 2017. Et côté musique, j’ai
enregistré 2 albums de slam : « Parole » (mélange d’électro-rock et de slam autour de la vie du Christ) et « Attentat à l’amour », un album de chansons autour de la solidarité. Je travaille en ce moment sur plusieurs projets d’albums collectifs. J’anime aussi le blog http://artspiin.eklablog.com, principalement autour des thématiques culture et société : les articles sont repris généralement par regardsprotestants.com.
Vous avez eu un ministère pastoral en paroisse. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Comment le berger d’un troupeau local concilie-t-il son activité avec une telle présence médiatique ?
L’Église dans laquelle j’étais pasteur depuis 7 ans avait beaucoup grandi et je me sentais pris de plus en plus entre des besoins grandissants dans la communauté locale et un appel « extérieur » grandissant lui aussi. En même temps, je défends l’idée qu’un pasteur a besoin de ne pas être « enfermé » uniquement dans son Église locale. Il a besoin d’autres engagements, d’une ouverture extérieure.
C’est pour moi une respiration nécessaire qui sera d’ailleurs un apport bénissant pour la communauté. Mais ce n’est pas toujours compris, et beaucoup de « troupeaux locaux » ont la fâcheuse tendance à vouloir faire de « leur » berger, leur « chose exclusive ». Je mets plein de guillemets volontairement, vous le comprendrez sans doute…Après, il faut trouver l’équilibre qui convient et puis, il y a un temps pour toute chose et n’oublions pas qu’un ministère quel qu’il soit, avec Dieu, n’est qu’une grâce, un service qui n’est pas forcément le même à vivre toujours et tout le temps de la même façon.
Vous êtes artiste porte-parole du SEL. Qu’est-ce qui vous a poussé à aller aussi dans cette direction ?
Avec Nadège, mon épouse, nous étions parrains depuis pas mal de temps. J’avais aussi participé à divers projets d’organisation de concerts pour soutenir le travail du SEL. C’est pour moi l’une des œuvres chrétiennes de solidarité qui me touche beaucoup dans sa vision, son organisation et son action. Quand on m’a proposé de devenir artiste porte-parole, j’ai accepté naturellement. Et puis, il y a eu un voyage en Inde. Bouleversant ! Rencontrer des gens qui se donnent littéralement pour aider des enfants, des familles dans une pauvreté absolue (inimaginable)… tout ça grâce au soutien de chrétiens de par le monde au travers du SEL en France ou de son partenaire Compassion pour l’international.
Il me semble extrêmement important de redire, là encore, que ces questions de solidarité sont essentielles et même fondamentales. Mon texte biblique « favori » se trouve dans Michée 6.8 : « On t’a fait connaître, ô homme, ce qui est bien et ce que l’Éternel attend de toi : pratique la justice, aime ce qui est bien et marche humblement avec ton Dieu ». Ce que l’Eternel attend de nous, de moi… voilà, on ne peut pas mettre ça de coté. Et Jésus va surenchérir en mettant l’amour de Dieu et du prochain comme commandement suprême ! Plutôt que nous battre contre toutes sortes de choses qui existent dans le monde, ou nous dévorer entre nous, je rêve d’une Église qui mette l’amour du prochain comme devoir premier et qui réalise que c’est là que nous commençons véritablement à être Sel & Lumière. C’est un défi de chaque jour (et pour moi le premier)… peut-être la chose la plus compliquée qui soit en fait… mais c’est là que nous sommes attendus !
Quelles sont vos nouvelles missions au sein de la Fédération Baptiste ?
Chargé du développement et de la communication. Mon temps à la fédération est partagé en deux : d’un côté je travaille au sein d’une équipe pour promouvoir dans nos Églises le besoin d’évangéliser, réfléchir aux enjeux, encourager des actions innovantes qui permettent d’être cohérents dans notre annonce de la Bonne Nouvelle. De l’autre, mon rôle est d’améliorer notre communication – interne et externe – en tant que fédération. Le fait de ne plus être pris chaque week-end par mon Église locale, me permet plus d’itinérance, de répondre à des invitations diverses pour enseigner, animer des ciné-débats ou concerts.
Depuis de nombreuses années, vous êtes membre du Jury Œcuménique du Festival de Cannes. Qu’est-ce que cette instance ? Quel est son rôle ? Les prix remis ont-ils une reconnaissance officielle ou underground ? A quels critères accordez-vous de l’importance ?
Oui je n’ai pas évoqué le cinéma… J’ai été membre du Jury œcuménique au Festival de Cannes en 2012 et l’année suivante à Berlin. Je suis depuis attaché de presse de ce jury à Cannes et je continuerai d’être membre occasionnel dans divers festivals. Le Prix du Jury œcuménique est une récompense cinématographique remise par un jury composé de chrétiens engagés dans le monde du cinéma dans de nombreux festivals. Le Jury est invité officiellement par les festivals.
À Cannes par exemple, depuis 1974, le Jury est officiel et l’un des trois (avec le grand jury et celui de la presse) à remettre un prix à la sélection officielle. À la fin du Festival, lors d’une cérémonie officielle dans l’un des salons du Palais des festivals, le Jury remet son prix en même temps que le jury de la presse, en présence d’invités officiels, de journalistes du monde entier, des réalisateurs primés, et de représentants de la direction du Festival.
Le Jury œcuménique propose un regard particulier sur les films. Il distingue des œuvres de qualité artistique qui sont des témoignages sur ce que le cinéma peut révéler de la profondeur de l’homme et de la complexité du monde. Il attire l’attention sur des œuvres aux qualités humaines qui touchent à la dimension spirituelle de notre existence, telles que justice, dignité de tout être humain, respect de l’environnement, paix, solidarité, réconciliation… Six critères accompagnent ses choix : la grande qualité artistique, le message de l’Évangile, la responsabilité chrétienne et le progrès humain, la dimension universelle, la créativité, la diffusion. J’écris aussi beaucoup sur les films qui sortent, participant régulièrement à des séances presse. Je suis invité assez souvent pour animer des ciné-débats.
Selon vous, qu’est-ce qui fait qu’un film présente de l’intérêt pour un chrétien ?
Le cinéma est un merveilleux moyen pour échanger avec l’autre. Il devient un support idéal pour échanger autour de notre vision du monde, de la société… avec d’autres chrétiens bien sûr mais surtout avec tous plus largement. Pour moi, le cinéma est un peu la parabole de notre époque. Il permet le partage mais il nous interroge aussi individuellement. Une majorité des films qui sortent se prêtent à la réflexion. Parfois, il y a une évidence bien sûr dans les thématiques abordées. Mais ce que j’aime beaucoup aussi, c’est justement trouver dans des films moins « évidents » cette même matière première. Jésus faisait cela très souvent en utilisant des choses du quotidien qui a priori n’avaient pas grand chose de « spirituel » pour interpeller et donner d’entendre à celui qui a des oreilles pour entendre…
Comment envisagez-vous la suite de votre vie professionnelle ?
Sincèrement, je n’ai pas de « plan de carrière » (rires). Le passé me fait dire qu’il ne vaut mieux pas que je m’aventure à me projeter trop en avant car je risque d’être vite à côté de la plaque ! En tout cas, je souhaite essayer d’être là où le Seigneur me place, me conduit. Un proverbe dit que « Dieu écrit droit avec des lignes courbes ». J’aimerais qu’il continue d’écrire au travers de moi même si ses directions sont parfois étonnantes, déroutantes mais toujours les meilleures : je le crois !